Fraternité de Villeneuve-la-Garenne (Île de France)
(Gilles,
Michel,
Gabriel)
de Gilles :
Ce matin, nous entrons en carême... Il fait
un soleil splendide, figure lumineuse et annonciatrice de la
Résurrection pascale... Michel et Gabriel sont partis au travail
aussitôt après la prière commune du matin. Comme je reste seul à la
maison et que tout semble calme, j’en profite pour vous écrire.
Nos journées commencent très tôt : Vers 4h15
l’ascenseur (tout juste derrière le mur de ma chambre), se met en
marche et reçoit ses premiers clients, nos voisins des étages
supérieurs. 5h15 : Michel s’active déjà à sa toilette et prépare son
café. Quelques minutes plus tard, il se prosterne devant le
Seigneur à la chapelle. Gabriel prend son petit déjeuner en vitesse,
tandis que je me douche. A 6h, à la chapelle, nous nous
rassemblons pour la louange matinale. Après la prière des
psaumes, nous déposons devant le Seigneur la journée qui s’annonce, le
travail, les rencontres, les soucis et préoccupations diverses : les
nôtres, ceux des voisins, des amis et de ceux et celles qui comptent
sur notre intercession. Nous le faisons en union avec toute l’Eglise et
au nom de nos frères et sœurs humains. Le "retraité" que je suis,
prolonge la méditation tandis que mes frères partent au travail. Il
fait encore nuit…
Depuis 4 années déjà, je m’efforce d’entrer
dans cette nouvelle étape de vie, celle de la retraite. Ce n’est pas
tout tracé d’avance. Des problèmes de santé ont mis brusquement fin à
la vie sur-active et débordante qui me comblait auprès de mes frères
africains. J’ai bien dû essayer - et ce n’est pas toujours facile - de
m’adapter à un nouveau rythme de vie, plus lent, moins pressé par les
activités et plus dépouillé d’une certaine « chaleureuse » proximité
humaine africaine. Ayant rejoint la fraternité de Villeneuve La Garenne
je chemine vers un nouvel équilibre. Tout en me rendant disponible pour
les nombreux services de notre fraternité, j’apprends à marcher
au rythme de mon âge et des mes capacités. J’essaie également de
m’investir au mieux dans certaines associations du quartier et dans
la communauté chrétienne paroissiale.
J’aime bien la vie dans cette banlieue
parisienne, « village mondialisé » où se côtoient les humains de toute
provenance. Les cultures et religions les plus diverses y coexistent en
relative bonne harmonie. Je suis heureux d’y rencontrer mes frères et
sœurs en humanité et de m’y reconnaître moi aussi en marche avec
eux sur ce même chemin. En cela, c’est vraiment une suite de mon
expérience de vie en Afrique.
*
A Villeneuve, nous continuons maintenant à trois : Michel, Gabriel et
moi. Depuis avril 2008, Tullio, Daniel et Jean-Claude ont emménagé dans
un immeuble (tout comme nous en H.L.M.) sur L’Ile Saint-Denis, tout
juste de l’autre coté de la Seine. Nous avons choisi de continuer à
constituer une seule fraternité, en deux appartements distincts mais
distants d'à peine quelques dix minutes de marche à pied. Cela est
riche de vie fraternelle. Deux soirées par semaine, nous nous
retrouvons pour l’Eucharistie communautaire, les repas, les partages,
pour étudier une question commune ou célébrer un anniversaire,
etc.
L’ensemble des frères travaillent dans diverses associations : aide aux
sans-abri, domiciliation, aide à domicile pour des personnes âgées,
service de propreté et nettoyage dans une maison de retraités ou encore
maintenance dans un grand magasin. Avec les années, la prière commune,
les partages fraternels, la connaissance mutuelle ont fait naître entre
nous écoute, compréhension, compassion, entraide et soutien réciproque.
Ce sont des dons précieux pour nous soutenir dans cette vie quotidienne
si bousculée et stressée, comme celle de l’ensemble de nos voisins,
collègues et amis. Oui, le rythme de vie est souvent trop
accéléré et tendu. Le travail s’effectue dans l’insécurité de
conserver son emploi. La pression exercée par l’employeur ou par les
chefs de service est constante et pousse chacun à un rendement maximum
alors que le personnel diminue, et les postes laissés par les partants
ne sont pas remplacés et apportent une surcharge de travail toujours
plus lourde. Mes frères travailleurs pourraient en parler mieux que moi
et surtout d’expérience. Quand, le soir, après le travail ils rentrent
à la maison, après avoir voyagés entassés dans les transports
publics surchargés et souvent perturbés, ils m’apparaissent souvent
fatigués et fourbus. J’ai une pointe d’admiration pour eux. Ils portent
le poids du jour en solidarité avec la plupart des gens de notre
milieu.
C’est également le soir, après le travail, que nous
accueillons des invités ou que se font les rencontres entre nous en
fraternité ou à la paroisse où chacun a un engagement. Gabriel est fort
actif dans la chorale qu’il a fondée avec quelques amis pour animer
quelques célébrations liturgiques paroissiales. Une fois par mois,
Michel participe à une petite équipe qui prépare la liturgie
dominicale. Quant à moi, je suis attaché au catéchuménat des
adultes.
Notre troisième appartement situé dans le même immeuble,
tout juste à deux escaliers du nôtre, a bien sa raison d’être :
accueil des gens de passage, pied à terre pour nos frères passant en
région parisienne, chambres servant parfois d’ermitage ou lieu de
premier accueil pour les regardants ou postulants. Dernièrement un
aspirant italien, y a résidé pour ses trois mois d’étude à
l’Alliance française, avant d'entreprendre le postulat.
|