Deuxième partie
VISITE DU PRIEUR
Diaire de visite de Giuliano en Italie
Le fait de devoir participer à la
réunion de l’Association Charles de Foucauld, qui cette année
s’est tenue à Sassovivo(1) chez les Petits Frères Jésus Caritas(2),
m’a permis d’unir le nécessaire à l’agréable et j’ai
décidé de visiter les frères en Italie. Depuis le dernier Chapitre
de Gubbio(3) je n’avais pas visité ni les frères de la fraternité
de Spello, ni Luigino, et je ne connaissais pas Betania où Tommaso
vit et accueille.
A Spello les journées ont passé très
vite entre dialogue avec les frères, visites aux amis et aux lieux.
J’ai même pu retrouver le plaisir de travailler parmi les oliviers
près de l’ermitage St-Elie. Ayant vécu 7 ans à Spello c’est
toujours une émotion assez grande de me retrouver dans ces lieux qui
ont, me semble-t-il, comme un "charisme" spécial et qui
savent parler aux cœurs des gens. On pourrait presque dire la même
chose, avec des nuances, pour les voisins de la fraternité, toujours revoir les frères. J’ai même pu
revoir San Girolamo(4), maintenant utilisé par l’Action Catholique
Italienne, et me recueillir sur les tombeaux de Carlo et Ermete. J’ai
parcouru avec émotion le cloître, les couloirs et la terrasse, et
avec un peu de tristesse, à cause des transformations subies,
l’ancienne chapelle et la cuisine.
Les frères vivent maintenant dans la
maison qu’on appelle "Beni-Abbès", et qui leur donne la
possibilité d’accueillir chez eux, car il y a pour les hôtes 7
lits en deux chambres. Avec Alberto, Franco, Gabriele et Yves nous
avons pu dialoguer à fond sur leur vie, les défis posés par
l’accueil et sur les perspectives futures. Ces dernières années,
l’accueil a beaucoup évolué pour différentes raisons dont
peut-être la principale vient des changements importants survenus
dans l’Église et la société.
Mais maintenant l'accueil me semble
mieux intégré avec les autres valeurs auxquels nous tenons : vie
fraternelle, insertion, travail et prière. Il faut dire aussi
qu’après le tremblement de terre de 1997, petit à petit le nombre
des "ermitages" disponibles pour l’accueil a beaucoup
diminué et deux d’entre eux sont bien éloignés. Les frères sont
aussi attentifs à essayer d’actualiser et de différencier les
propositions d’accueil qu’ils font. Alberto continue avec goût
sa formation de physiothérapeute, Franco est surtout pris par la
cuisine, les courses, etc. (un peu de peinture aussi...), Gabriele
est un peu l’homme à tout faire (jardin, gestion et entretien,
etc.) et Yves reste l’homme des oliviers (travail qui équilibre
son service comme responsable régional). Après ma tournée dans le
Nord de l’Italie, j’ai pu passer encore quelques heures à
Spello, et avec les participants à la réunion de l’Association
nous avons visité la fraternité, célébré et mangé ensemble avec
les frères. Pour certains, il s’agissait de retrouvailles, car
c'est à Spello que beaucoup ont découvert Charles de Foucauld et
les fraternité
*
Luigino est arrivé à Spello à la fin
de la semaine et ensemble nous avons pris la route pour le Nord.
Trois heures de route et nous sommes arrivé à Bologna, dans le camp
tzigane où il a une caravane et qui est son chez lui. On a partagé
un bon repas avec les voisins, bavardé amicalement avec eux, puis
nous avons repris la route. Quatre heures après nous sommes arrivés
chez Tommaso. Ça faisait longtemps que je ne passais un moment de
dialogue aussi riche avec Luigino. Son langage très personnel peut
être très expressif. Je garde une impression forte de sa fidélité
exigeante aux gens du voyage et à notre vocation.
Son réseau de relations est
impressionnant. Comme aussi son attention à l’actualité. Nous
nous sommes questionnés réciproquement. Comme avec d’autres
frères vivant seuls et arrivant à un certain âge, il est
nécessaire de poursuivre le dialogue pour voir comment aborder cette
étape de notre vie. Il est reparti le lendemain à Vicenza pour
faire des examens médicaux. Aux dernières nouvelles Luigino a
repris sa route, sans doute avec des médicaments à prendre et un
régime à suivre...
*
Je ne connaissais pas Betania, la
maison ou vit Tommaso, près de Padenghe, village sur le lac de
Garde. C'est une grande ferme réaménagée, éloignée du village et
située dans un endroit bien tranquille entouré de champs. Elle est
assez grande pour pouvoir accueillir pas mal de monde. Tommaso
ressentait le désir de vivre un projet d’accueil, en faisant
communauté avec des laïcs, en Italie. Avec Tommaso j’ai passé
toute une semaine.Son attention fraternelle a été constante et nous
avons pu dialoguer longuement. Quand je suis arrivé, il y avait déjà
deux hôtes et d’autres sont arrivés pendant la semaine. Aux
moments forts ont participé aussi des gens du village. Les liturgies
célébrées à la maison ont été bien vivantes. Pendant la
semaine, j’ai connu les personnes qui collaborent étroitement avec
Tommaso. Delfina, de la Fraternité Jesus Caritas qui, tout en vivant
à Milano, vient souvent pour partager avec Tommaso vie et accueil,
Guglielmo et Marisa de Brescia, Giovanni, le propriétaire de la
maison, et tant d’autres. Tous font partie de l’Association
Betania et collaborent avec Tommaso. J’ai eu l’impression que,
grâce à eux aussi, le projet de Tommaso s’est précisé et est en
train de poser des bases plus solides. L’accueil s’inspire de
l'expérience de Spello, mais il a aussi des caractéristiques
propres car chacun des intervenants apporte quelque chose de
personnel.
*
Mon séjour en Italie s’est terminé
avec la réunion de l’Association Famille spirituelle Charles de
Foucauld. Elle a lieu tous les deux ans, et y participent les
Supérieurs de chacun des 20 groupes faisant partie de
l’Association.6 Cette année, elle s’est tenue donc à Sassovivo.
Le thème de la rencontre était "L’évangélisation selon
Charles de Foucauld". Des intervenants nous ont aidés à
redécouvrir les textes de C. de F. à ce sujet. D’autres sujets
plus pratiques ont aussi été abordés:le site Web (charlesdefoucauld.org), le
lieu et le thème de la prochaine rencontre. Tout au long de la
rencontre, nous avons pu approfondir la connaissance entre les
différents groupes et cela a été très bon.
Bien sûr j’ai
visité Assisi, et sur le tombeau de St. François j’ai prié pour
chacun de vous. Et comme dans l’actualité était bien présent ce
qui se vit dans le monde arabe et l’Islam, j’ai repensé à ce
qu’avait été l’attitude de François lors des croisades. Il
semblerait aussi que c’est au retour de la croisade que François a
composé, à Greccio, la première crèche vivante. Comme pour dire
qu'il n’est pas nécessaire de reconquérir les lieux saints, car
Jésus naît toujours au milieu de nous chez les pauvres.