Un Ami pour la route


Jésus et deux diciples sur la route d'Emmaûs



Ami    Christophe m'a demandé de commenter ce texte magnifique des disciples d'Emmaüs que la liturgie de Pâques nous offre aujourd'hui.

Je ne vais pas le prendre directement mais j'aimerais vous inviter à le retrouver en regardant cette icône qui nous a accueillis à notre entrée dans l'église.

Je suppose que tout le monde sait qui est représensur cette icône. Jésus bien sûr, avec son auréole et sa croix. Et l'autre? C'est Charles de Foucauld, celui dont la vie inspire notre fraternité des Petits frères de sus, dans laquelle Christophe s'engage définitivement aujourd'hui.

Pour ceux qui ne le connaissent pas du tout, il suffit de savoir qu'un jour, le ptre qui l'accompagnait et le guidait a dit de lui: «Cet homme fait de la religion un amour », pas une histoire de célébrations ou de rites, mais une histoire d'amour.

Il me semble que c'est ce que l'icône nous montre: on a tout de suite l'impression qu'on est en présence de deux amis.

Eh bien, la vie religieuse dans laquelle Christophe s'engage pour toujours, c'est précisément une amitié: répondre à l'amitié que Jésus nous offre, faire de cette amitié avec Jésus le centre de notre vie. Dans l'icône, le signe de cette amitié, c'est la main de Jésus poe sur l'épaule de Charles: la main de l'ami(e). La main qui encourage quand nous hésitons: « Allez, va-y, tu vas y arriver» ; et la main qui nous rattrape et nous retient: « Arrête, ne fais pas l'idiot ». La main des moments de joie, pour dire « Je t'aime» sans le dire. Et surtout la main chaleureuse sur lpaule quand on est dans la peine et qu'on pleure: quand il n'y a rien à dire, simplement manifester la présence, signe qu'on porte les choses ensemble.

Un chant disait: « Tu as posur moi ta main, ta main me conduit! » Voilà ce qu'est la vie religieuse avant tout: une amitavec Jésus.

On retrouve ici notre évangile des disciples d'Emmaüs: Jésus ressuscité se rend présent à ses amis complètement désorientés après sa passion et sa mort et il marche avec eux. Même s'ils ne le reconnaissent pas tout de suite, il est là, comme un dialogue offert, une main qui rassure.

Arrêtons-nous maintenant sur la main droite de Charles. Elle me fait penser aux photos de groupe: il y a toujours quelqu'un qui profite que son voisin ne voit rien pour lui faire les oreilles d'âne. Ici, c'est un peu pareil: Jésus est en arrière et ne voit rien, et Charles, de la main, en profite pour nous dire: « Regardez-le, lui. Ne me regardez pas moi; l'important, c'est lui! »

C'est aussi une autre caractéristique de la vie religieuse: ce qui est important, ce qui est réussi, ce n'est pas ce que fait tel frère ou tel père, telle sœur ou telle communauté – même si ce sont souvent des choses belles et bonnes. Ce qui est réussi, c'est quand la vie de ce religieux (ou de cette religieuse ou de cette communauté) laisse transparaître quelque chose de Jésus, quelque chose de l'amour de Dieu. La vie religieuse, elle parle d'un Autre.

Un peu comme les disciples d'Emmaüs: une-fois qu'ils ont reconnu la présence de Jésus, ils courent porter la bonne nouvelle aux autres disciples; leurs projets passent au second plan, leur fatigue ne compte plus: l'important, c'est de courir annoncer que Jésus est vivant!


Qu'est-ce que Jésus tient dans la main gauche. C'est quoi ce livre? La Bible? L'évangile? La parole de Dieu? Disons que c'est le Livre de vie.

Qu'est-ce qu'il y a dans ce livre?

Oui, d'abord la parole de Dieu, la parole que Jésus nous a transmise. Si elle est sur cette icône, c'est pour nous signaler quelque chose d'important. C'est comme si, depuis l'icône, Jésus nous disait: « Si tu veux retrouver mon visage et deviner qui est mon Père et votre Père, un bon chemin, c'est de lire et de relire toujours la parole de Dieu; petit à petit tu verras qui je suis et comment je me comporte, et tu apprendras à agir comme moi. »

On retrouve l'histoire des disciples d'Emmaüs: que fait Jésus? Il part des écritures pour aider les disciples à relire les événements, à comprendre ce qui leur arrive et à comprendre qui est Jésus. Et leur cœur devient tout brûlant …


Mais il Y a autre chose dans le Livre de vie: il y a aussi notre vie.

On n'y pense pas assez. Pourtant la Bible est pleine de passages où il nous est dit combien la vie de l'homme intéresse Dieu. Les psaumes par exemple sont remplis d'expressions comme: « Il voit le cœur de chacun» ; « Il entend le cri des pauvres» ; « Tu recueilles dans ton outre mes larmes ». Ou cette phrase magnifique: « Est-ce que les larmes de la veuve ne coulent pas sur les joues de Dieu? » Il y a aussi les remarques de Jésus qui souligne tout ce qui est beau autour de lui: la pauvre veuve qui a donné tout ce qu'elle avait; la foi d'une étrangère, ou d'un officier romain. Ou bien quand il est tout remué de voir une maman enterrer son fils unique. Dieu est attentif à nos vies, nos noms sont inscrits dans son livre

En quoi ça peut intéresser Dieu, les choses de notre vie? Pas pour nous attendre au tournant, dans le genre « Attention, je vous surveille l » Non. Mais parce que nous sommes faits à son image: et ça le passionne de voir comment nous nous y prenons pour lui ressembler, avec les choses ratées et les choses réussies. Et puis, son Fils, « le plus beau des enfants des hommes », a fait de chacun et de chacune son frère ou sa sœur, alors bien sûr que ça l'intéresse.


Revenons à l'icône. C'est intéressant de voir que Charles tient dans sa main une feuille de papier. Comme s'il avait entendu Jésus lui dire: « Pour que la vie des hommes soit inscrite dans le Livre de Vie, j'ai besoin de tes yeux pour la voir, de tes oreilles pour entendre, de ton cœur pour vibrer; et que tu prennes le temps de me l'écrire pour que rien ne soit perdu. »

C'est à cela aussi que Christophe s'engage aujourd'hui: vivre dans la vie ordinaire, de travail, de quartier, de fraternité, avec les yeux, les oreilles et le cœur grand ouverts pour recueillir la vie des gens et pour la porter dans la prière. Prendre du temps pour laisser résonner la vie dans son cœur, prendre du temps pour être avec Jésus simplement, le cœur plein de la vie de ceux et celles qu'il rencontre, laisser Jésus transformer son cœur pour aimer mieux et aller toujours plus loin dans la rencontre des autres.

C'est ce qui est arrivé aussi aux disciples d'Emmaüs: ils ont retenu Jésus pour qu'il passe un moment avec eux; et là ils ont reconnu son nouveau visage de ressuscité, ils ont réchauffé leur cœur, ils ont repris des forces avec le pain de vie.


J'avais envie d'ajouter deux choses. La première, c'est que cette icône a une histoire: au départ, c'est une très belle icône égyptienne du 7ème siècle qui est au musée du Louvre; elle représente Jésus et un moine, l'abba Mina. Et puis elle a été « piratée », comme on dirait aujourd'hui, et on a remplacé Mina par Charles de Foucauld. Je trouve que c'est une très bonne idée: chacun de nous pourrait repartir chez lui, prendre des ciseaux,découper le visage de Charles et le remplacer par sa propre photo! Parce que ce qui est représenté là est offert à chacun et chacune de nous et pas seulement aux religieux: devenir l'ami de Jésus,avoir une vie qui parle de Jésus et porter dans nos cœurs la vie du monde.


La deuxième chose, je vais la dire à l'oreille de Christophe. Tu vois ces deux-là: quand je les regarde, je trouve qu'il y a sur leur visage beaucoup de paix, une sorte de petit sourire, un regard en profondeur, une complicité. Ils rayonnent la paix et la joie intérieure. Comme un frère aîné, j'ai envie de te dire: tu peux avancer avec confiance à leur suite: c'est un chemin de joie et de paix.

Marc


Vœux perpétuels de Christophe Savalle

8 Mai 2011 en l'Église St Benoît Labre

Lille






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