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. Découvrir Villeneuve la Garrenne avec Paul-André . Après ces premiers mois passés à Villeneuve La Garenne, mes frères m’ont
encouragé à écrire un diaire et vous partager mes découvertes
C’est un vieux rêve que je portais depuis longtemps, celui de vivre en H.L.M.1 dans un milieu multi-ethnique. Ce qui m’avait motivé à participer à la fondation de la fraternité de La Roque c’était le projet d’accueil et d’animation de retraites spirituelles ; mais avec le temps cette demande s’est amenuisée. Aussi, quand Michel a exprimé son souhait de permuter avec moi afin de se rapprocher de sa maman j’ai saisi l’occasion pour concrétiser mon rêve et rejoindre ainsi cette fraternité de la banlieue parisienne de 6 frères (Tullio, Xavier, Gilles, Jean-Claude, Daniel) en deux pôles, c’est-à-dire en 2 logements situés à 10 minutes à pied l'un de l'autre; nous nous retrouvons ensemble au moins 2 fois par semaine, le mercredi et le samedi pour prier, manger ensemble… joie de la vie fraternelle ! Je suis donc arrivé à Villeneuve La Garenne en juillet 2018. J’ai consacré les premiers mois à découvrir le milieu, les environs, la paroisse… Quelle ne fut pas ma surprise ! Je m’étais imaginé qu’il s’agissait d’un quartier très bruyant, même violent et c’est tout le contraire. Selon mes frères, qui sont ici depuis plusieurs années, l’ambiance a bien changé suite à la réhabilitation des logements avec démolition d’immeubles insalubres, aménagement de routes, d’espaces verts… la présence de nombreuses associations pour jeunes, ados, seniors, facilitent aussi “le vivre ensemble”. Par contre je reste étonné devant le volume de nos “poubelles”; une fois par mois la ville organise le ramassage des encombrants et ce sont chaque fois des montagnes d’objets jetés : meubles, lits, tables, chaises, réfrigérateurs, cuisinières… Cela fait la joie de “récupérateurs” (ferrailleurs, gens du voyage, migrants) qui passent avant le camion poubelle pour dénicher ce qu’ils peuvent : cohabitation d’une société d’abondance et d’une société d’exclus ? De
même je suis émerveillé par la vitalité de notre paroisse. La
communauté chrétienne de Villeneuve La Garenne rassemble plus d’une
trentaine de nationalités avec une dominante Antillaise; nous venons
de vivre une célébration “outre-mer” haute en couleurs et en
chants créoles. Pour Pâques 5 adultes ont reçu le baptême lors de
la veillée du samedi saint et 6 adolescents le lendemain. Les messes
quotidiennes réunissent plus d’une vingtaine de fidèles. Chaque
dernier dimanche du mois nous sommes invités à un repas partagé
afin de mieux se connaître : joie de la vie communautaire !
Comme
nouveau arrivé dans ce quartier je me suis mis en quête de lieux
d’engagement. Mes dernières années avaient été consacrées au
monde des handicapés grâce à l’accompagnement de Sébastien, un
jeune traumatisé crânien et aussi des malades, des personnes âgées
dans les différents établissements de la ville de La Roque. Donc,
en me promenant ici autour de l’hôpital proche de notre logement,
j'envisageais la possibilité de visiter les patients; de plus
une maison d’accueil pour traumatisés crâniens est jointe à cet
hôpital. Voilà qu’un jour, en marchant avec Gilles dans la ville
voisine de St-Denis, je fais une chute de trottoir qui m’occasionne
une fracture du fémur. Afin de réparer cette jambe gauche, le
chirurgien me propose un clou de 42 cm avec l'interdiction de
poser le pied-à-terre pendant 8 semaines. Pour ma rééducation je
fus conduit à l’hôpital de Villeneuve la Garenne, ainsi j’y
entrais non pas comme visiteur mais comme patient : bienheureux
accident qui m’a permis de découvrir ce monde des hospitalisés,
et ainsi de passer du “faire pour” au “être avec”. De fait
cet évènement m’a amené à faire l’expérience de la
dépendance et de la faiblesse, j’ai appris à me faire laver les
pieds… Ce séjour de 2 mois et demi en hôpital a été l'occasion
de me familiariser avec les malades, le personnel et les médecins ;
j'ai beaucoup apprécié l’ambiance et la qualité des soins
jusqu’au jour où le médecin-chef me rencontre et me fasse une
proposition : il voulait mettre sur pied une équipe « d’aide
aux aidants » (c’est-à-dire aux accompagnateurs de patients
qui ont des handicaps lourds), et il m’invitait à en faire partie.
Cette équipe comprend des professionnels (médecins, psychologues,
secrétaires médicales…) et des bénévoles. Une fois par mois
nous nous retrouvons autour d’un repas partagé pour se donner des
nouvelles et s’encourager. La coordinatrice propose des activités
et des groupes de parole tant pour les patients que pour les aidants.
Chaque mois le médecin chef donne une liste des personnes à visiter
et donc le mardi et le jeudi après midi je m’organise pour rendre
visite à plusieurs hospitalisés et avec les personnes qui le
souhaitent nous participons à des Séances de méditation et
d’auto-massage. Avec des bénévoles une ‘‘cafète’’ a été
ouverte pour accueillir patients, visiteurs autour d’une boisson.
J’aime beaucoup ces rencontres qui sont l’occasion d'écouter, de
partager sur le sens de la vie, la souffrance et même la mort.
J’appuie ces paroles de Jean Vanier :“La faiblesse est le lieu de
la relation et de la rencontre” et “voir en notre sœur ou frère
souffrant Jésus vivant.”
J’ai
aussi accepté quelques services au niveau de la paroisse. Le curé
m'a proposé de rejoindre l'équipe d’accompagnement des
catéchumènes : quel bonheur de découvrir cette soif de
spiritualité dans le cœur de ces personnes en quête de Dieu !
Je participe aussi à l’une des 4 équipes de liturgie chargées de
préparer les célébrations dominicales, c’est l’occasion de
vivre un partage sur la Parole de Dieu en scrutant les lectures du dimanche. Ceci dit la majorité de la population de notre quartier
est de religion musulmane. Lors de la messe de Noël une délégation de fidèles musulmans a participé à notre célébration et à la
fin elle a chanté une sourate qui parle de Myriam et le responsable
a présenté à l'assemblée des vœux de paix et de bonheur. La
déclaration du pape François signée le 4 février avec le grand
imam d'Al-Azhar, intitulée “document sur la fraternité humaine
pour la paix dans le monde et la coexistence commune” nous stimule
à progresser dans le dialogue avec les croyants des autres
religions.
La
région parisienne regorge de ressources tant au niveau social,
culturel et religieux. La famille spirituelle de Charles de Foucauld
y est fort bien représentée ; lors de notre dernière
rencontre nous étions une cinquantaine réunie autour de
l’Eucharistie et d’un repas partagé.
Bien-sûr la moyenne d’âge
qui est élevée nous questionne : comment rejoindre les
jeunes ?
Pour terminer je voudrais remercier et les frères de La Roque pour les quinze années partagées et les frères de Paris qui m’accueillent maintenant. Avec le temps je me rends compte que la richesse de notre vie communautaire n’est pas tant dans la mise en commun de nos compétences mais plutôt dans le partage de nos expériences et fragilités. Voilà où j’en suis… |