VISITE DE JOJI EN BOLIVIE

 

La Bolivie se situe au cœur de l’Amérique du Sud. C’est un grand pays de 1 million de kilomètres carrés, peu peuplé (9 à 10 millions d'habitants). La population est en majorité indienne (Quechua et Aymara dans les montagnes, Guaranis dans les plaines du sud). La Bolivie comprend tous les climats possibles, de la forêt équatoriale aux montagnes de la Cordillère des Andes au nord-ouest (L’Illimani culmine à 6600 m), et on peut y cultiver ainsi presque tout : aussi bien du cacao que de la pomme de terre (qui est originaire de cette région), de la banane ou du thé...

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Dans les temps anciens, le territoire de ce qui est la Bolivie maintenant, était prospère. S’y sont développées des civilisations anciennes originales et très importantes… Lorsque les Espagnols arrivèrent au XVIe siècle, l’empire Inca était affaibli par des luttes intestines pour prendre le pouvoir.

En 1532, Pizarro commença à conquérir l’empire Inca, aidé plus ou moins par des ethnies rivales opprimées, qui au début ont accueilli les Espagnols comme des libérateurs. A leur tour, ceux-ci ont assujetti les “Indiens” et ont développé toute une économie de pillage des richesses du pays (arts, mines, cultures…), et l’obligation du travail gratuit pour les natifs… Une structure sociale s'est alors développée aboutissant à la domination totale des “Indiens” originaires du pays. En haut de l’échelle, étaient les colons espagnols qui tenaient les postes administratifs et ecclésiastiques; en dessous les "criollos", fils d’Espagnols nés en Amérique; au troisième niveau, les métis de sangs mêlés espagnol et indien, dépréciés par les Espagnols et les "criollos", mais également exploiteurs des Indiens; tout en bas de l’échelle, les "Indiens", majorité opprimée.

L’évangélisation des "indiens" est venue avec la colonie. Ils furent baptisés, souvent par la force. Cette évangélisation fut très mêlée à la conquête coloniale. Mais certains missionnaires comme les premiers évêques défendirent les Indiens (Fray Bartolomé de Las Casas est le mieux connu)…

Titicachi

Titicachi

 

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Cochabamba

 

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Réunion régionale

 

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Voeux d'Oswaldo

 

Au XVIIIe siècle, il y eut beaucoup de soulèvements indiens de libération de la colonie… Mais ce sont les "criollos" qui, se soulevant avec l’aide des "indiens" entre 1800 et 1825 réussirent à obtenir l’indépendance, emmenés par Bolivar[1] et Sucre. Bolivar voulait redonner leurs droits aux Indiens; pourtant l’indépendance avec l’avènement de la République ne changea rien au régime d’esclavage des Indiens, les "criollos" ayant tout simplement pris la place des Espagnols. L’assujettissement des indigènes se renforça même: expropriation des terres des Indiens, développement des haciendas (où les indigènes devaient travailler au moins 4 jours par semaine, gratuitement pour un “patron”...).

Le 9 avril 1952, une révolution éclata à La Paz: elle aboutit à la réforme agraire de 1953 où les "indiens", dans la région andine de Bolivie, récupérèrent leurs terres...

La situation sociale et politique actuelle de la Bolivie est toujours difficile.

[1] Qui venait du Venezuela.

 

texte de Patricio  [2]

« …Dans un passé récent, deux très fortes crises ont abouti successivement à la destitution du président de la République Gonzalo Sanchez de Lozada en octobre 2003 (il a dû partir après la répression sanglante d'une manifestation), puis à la démission du président suivant Carlos Mesa en juin 2005. Le pays était alors au bord de la guerre civile. Maintenant, la Bolivie connaît une période de calme apparent sans manifestations ni barrages de routes, sauf dans le cas de conflits locaux: les barrages de routes sont ici devenus une institution pour défendre son point de vue ou faire avancer une cause juste ou discutable.

[2] Frère de la fraternité de Cochabamba en Bolivie.

 

Il faut bien que le pays reprenne son souffle, que l’économie se remette à tourner, et que les gens vivent ou survivent (un barrage dans le Chapare - province voisine de Cochabamba au climat tropical - signifie que mes voisines de la Cancha[3] n’auront demain à vendre ni bananes pour les unes, ni papayes pour les autres, ni oranges pour d’autres;  lorsque le barrage dure, l’angoisse du lendemain s’installe). Après chaque crise le pouvoir d’achat de chaque famille baisse sensiblement. Mais il est évident que le feu couve sous la cendre du provisoire… Les prochaines élections générales (du président, des préfets, des députés et des sénateurs) vont-elles résoudre les problèmes de fond qui se posent?

La lenteur des processus et l’imprécision quant aux décisions vitales à prendre donnent l’impression que les forces qui manipulent les évènements au-dedans et au dehors cherchent à retarder la mise en action des réformes nécessaires. Grosse bombe à retardement! Jusqu’à quand? Certains, en tergiversant, espèrent sans doute gratter quelque avantage du provisoire… D’autres, généralement des mères de famille, (parfois avec des enfants en bas âge qu’elles laissent aux soins de la grand-mère), optent pour partir en Europe à la recherche de travail: la queue est longue, jusque dans la rue, devant les bureaux de l’émigration pour obtenir un passeport.

L’élection d’Evo Morales (candidat indigène ouvertement opposé au néolibéralisme ainsi qu’à l’ingérence et à la domination des États-Unis) peut changer la donne. Cependant, elle laisse beaucoup d’inconnues dues aux doutes sur sa capacité à gouverner, à sa fidélité ou non à ses idéaux, et aux pressions qui s’exerceront sur lui ».

 

[3] Grand marché de Cochabamba où Patricio travaille.

texte de Francis [4]

«…Les belles célébrations de Noël et la fête du Nouvel An ont été comme imprégnées 'd'une grande joie pour tout le peuple' d'ici…: l'élection d'un Indien Aymara, Evo Morales, le 18 décembre 2005, comme président du pays. D'ailleurs on peut remarquer chez les gens quelque chose de nouveau, une certaine fierté sur leur visage.

Ils perçoivent de ce nouveau président, que 'c'est vraiment l'un de nous'. En effet, enfant, il a été berger d'un troupeau de lamas dans les steppes des Hauts Plateaux. Il est né dans une famille très pauvre de sept enfants, dont quatre sont morts en bas âge. Il a vécu dans une petite chaumière, d'une seule pièce, de trois mètres sur qua­tre, il a pu faire des études secondaires dans une ville voisine, tout en ayant comme première préoccupation celle de la survie plutôt que celle des études mêmes. Il avait trouvé du travail dans une briquete­rie et une boulangerie. Plus tard, suite à une période de sécheresse prolongée, toute sa famille dut immigrer dans des vallées tropicales. Il avait alors vingt ans.

L'année suivante il fut témoin d'un crime sauvage de la part des militaires : celui d'un paysan brûlé vif pour ne pas s'être déclaré coupable de trafique de drogues. C'est alors qu'il s'est promis de lutter inlassablement pour le respect des droits de l'homme, pour la paix et la tranquillité sur leur terre, pour la récupération des ressources naturelles, pour la terre de ceux qui se sont regroupés dans le 'mouvement des sans terre' et pour le territoire des peuples indigènes, pour la défense de la souverai­neté nationale et pour la dignité des boliviens. Au long de ses luttes syndicales, il a connu à la fois l'emprisonnement, la torture et l'exil.

Son élection comme président de Bolivie est sans aucun doute un fait qui marquera dans l'histoire de notre pays et en particulier dans la longue histoire de violations des peuples indiens… »

 

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 En Bolivie, existent deux fraternités. Celle de Titicachi a commencé il y a 31 ans avec Francis  et Max, toujours présents. Celle de Cochabamba a été fondée il y a 6 ans: y vivent actuellement José-Luis, Patrick et Oswaldo.

 

 

[4] Frère de la fraternité de Titicachi en Bolivie. Ce texte a été écrit après la rencontre, en janvier  2006.